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Namaste






Alors que je finissais mon travail d’écriture en fin de journée, je reçus un petit texte venu se poser délicatement dans ma messagerie :

" Qui sait ce que le temps va retenir de l'histoire des mots, mais si nous sommes des chercheurs, les mots nous dévoileront leurs merveilles cachées,

Les mots sont comme des oiseaux qui se posent sur les lignes de la portée musicale pour y jouer l'harmonie intérieure qui touche nos cœurs ". . .


Quelques lignes aussi douces plus loin, je lisais ce simple mot qui voyage à travers le monde parmi les porteurs de lumière : Namaste. Ce mot est une perle de lumière. Une vibration venant du fond des âges, venant du cœur même de la Terre. Il est intraduisible, même si des approximations tentent d’apporter un sens. C’est un espace. Un espace que nous mettons entre nous. Un espace de bienveillance, de lumière, de paix, d’amour, de rencontre. « Namaste. Je te propose de poser cet espace entre nous, en nous, et de devenir cette présence, ensemble » disait un vieil indien au sari lumineusement blanc.


Après avoir lu je préparais ma petite cérémonie de cacao. Presque quotidienne, cette cérémonie tisse en moi un lien avec cette plante qui vient d’un autre continent. Nous apprenons à nous rencontrer. J’aime « marcher » avec les plantes. Les diéter, les laisser m’imprégner, amener une présence particulière, se présenter au-delà de tout concept ou toute idée reçue. J’aime la rencontre, la transmission directe. Patiente…

Une fois la préparation achevée, je l’emportai dans le salon où j’allumai un feu dans la cheminée et préparais un petit espace face aux flammes. Je me posais là. Afin d’écouter à la fois le cacao, le feu, la présence… Après quelques gorgées de cacao, je laissais monter en moi, comme une interrogation, « namaste ».

Je regardais dans le mulul* le fond de la boisson brune : « namaste ». Il n’y eut aucun écho.

Je regardais le feu : « namaste ». Il n’y eut là non plus aucun écho.

Je répétais « namaste ». J’espérais. Je demandais un signe extérieur de ce namaste. Peut-être un crépitement particulier dans le feu, une vibration dans le mulul… J’essayais plusieurs fois, mais rien ne se produisit.

Alors je laissais mon attention revenir à la respiration. Au corps qui était posé face au feu. A l’harmonica et à la guitare qui attendaient d’accompagner cette cérémonie avec leur douce musique. J’étais entre le cacao, le feu, l’air ambiant et les instruments de musique. Juste présent.


« Namaste » sentis-je monter en moi. Je regardais le feu, pensant que c’était un message du feu. Ni lui, ni le mulul ne laissaient émaner quoique ce soit de particulier.

« Namaste » reprit la voix. Je regardais autour de moi, sans arriver à définir l’origine de cette voix que j’entendais à l’intérieur. Quel esprit bienveillant pouvait bien murmurer cela à l’intérieur de mon oreille ?

- Je ne suis pas à l’extérieur » répondit la voix.

- Es-tu une voix intérieure ? demandais-je à tout hasard.

- Je suis partout, me répondit-elle.


Je cherchais un signe extérieur, voire un signe intérieur, et finalement c’était si présent que j’étais intégré dans ce champ vibratoire. Je me croyais extérieur, séparé, alors que j’étais invité, accueilli, unifié.

J’ai regardé à nouveau le feu. Il avait une autre présence. Comme participant à cet instant, présent lui aussi. Attentif et présent.

Je regardais le fond du mulul*, et sans que je le réfléchisse, mes mains prirent délicatement le récipient et je portais les dernières gorgées de cacao à mes lèvres. Son goût, sa présence étaient indescriptibles. C’était un cacao namaste. J’ai savouré cela. Lentement. Très lentement. J’ai écouté cela.

Le feu, le cacao, la tasse, l’air ambiant, la guitare et l’harmonica goutaient cela avec moi. Lentement, l’harmonica a appelé ma main, et a extrait un souffle de mes lèvres. Il a joué pour nous. Invitant la guitare aussi à offrir son chant peu après. Namaste.


Émanant de l’air ambiant, une voix féminine, angélique, me parlât : « tu vois, on ne prend pas assez le temps de se retrouver. De se poser. Surfant sur la vague des actions et activités, tu en oublies de regarder le soleil se coucher. Tu en oublies de le regarder avec nous ». Je sentais dans ce « nous » toute la vie, toute la forêt, tous les ciels et tous les soleils, tous les animaux et les personnes qui me sont proches autant que les personnes que je ne connais pas.

La voix angélique poursuivit d’un doux « namaste ».

Quel rappel… quelle invitation…


À quoi cela sert-il de cumuler des actions et des actes, de faire, si nous en oublions l’essence, le goût partagé avec toute la création, la présence vibrante, la saveur unique de chaque instant. J’ai senti en moi une légère culpabilité, un fond de jugement qui montait.

À ce moment-là, la voix reprit « namaste ».

Je le sentis comme un au revoir, et comme une promesse de rendez-vous. Une occasion que je pouvais saisir à chaque moment de revenir à cette présence, à ces présences. Oui. Namaste…


La culpabilité s’est envolée. A la place, le cœur gonflé de gratitude, mes sens percevaient à nouveau l’air ambiant. C’est alors la guitare qui entonna son chant, un air à six cordes. L’instant était magique. Empli d’amour. Empli d’espérance…Namaste.


Je vous écris pour vous envoyer à travers ces mots, à mon tour, ce « namaste ».

Nous nous retrouvons tous quand nous nous ouvrons à ce champ unifié et vibrant de la Vie.


Namaste…

Une promesse de rendez-vous.

pas avec toi,

pas avec moi,

pas avec nous ou qui que ce soit,

juste avec ce qui est,

ouvert,

éternellement ouvert,

éternellement rayonnant.

Namaste

Oui, accueillons cet éternellement rayonnant,

et l’espace d’un instant, d’un présent,

soyons éternellement rayonnants.

Namaste.



* récipient dans certaines traditions d’Amérique du Sud/Amérique centrale pour boire seul ou à plusieurs lors de cérémonies de cacao

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